Un petit mot sur la Paracha לעילוי נשמת אבי מורי ראובן בן איסר ע״ה ישראליוויטש

Pin’has / Les Filles de Tselofhad et les Fils de Moché

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Dans notre Paracha, il est beaucoup question d’héritage… 

D’abord, de l’héritage collectif. Les Hébreux entrent dans le vif du sujet. Moché les prépare à la prise de possession de la Terre Promise et est développée dans notre Paracha la méthode d’attribution des territoires et des parcelles aux tribus et aux familles… L’héritage est ici la réalisation de la promesse divine faite à  Abraham 400 ans plus tôt et finalement, c’est le peuple dans son ensemble qui va bénéficier de son avènement. Il ne s’agit pas d’une affaire personnelle. 

Cependant la Paracha fait un focus particulier sur un cas spécial, et lorsque la Torah s’arrête sur une exception, c’est forcement  pour mettre en lumière un aspect plus général… 

La répartition de la Terre dans notre Paracha répond au principe de la transmission patriarcale. L’héritage se transmet de père en fils, les filles héritant de ce qui revient à leur mari. Mais nous avons ici l’histoire des 5 filles de Tselofhad. C’est d’ailleurs cette particularité  qui fait sortir ce personnage de l’anonymat des quelque 600.000 hébreux. Tselofhad meurt, sans avoir laissé de fils. Ses 5 filles vont donc exposer à Moché leur cas: il n’était pas juste que la part de leur père soit effacée uniquement parce qu’il n’avait pas de garçon! 

Leur question est le point de départ à de nombreuses discussions dans le Talmud et la Loi Juive si bien que beaucoup leur reconnaissent l’immense mérite que tous ces sujets soient liés à leur fratrie.

Il est d’ailleurs intéressant qu’en français, on n’ait pas de mot pour désigner une fratrie de soeurs, le mot sororité renvoyant plus à la solidarité féminine qu’au lien naturel entre soeurs d’une même famille. Quoi qu’il en soit, dans cette famille de 5 filles, s’il y avait eu un seul garçon, on n’en aurait pas entendu parler… Ce qu’on sait d’elles, et c’est le Midrash qui nous le dit, c’est qu’elles étaient des femmes très intelligentes et très unies. Quand elles se présentent à Moché, c’est toutes ensemble, et devant toute l’élite du peuple réunie, elles exposent un argumentaire d’une telle justesse que Moché doit s’en remettre à D.Ieu qui lui répond: « Les filles de Tselof‘had parlent juste Leur demande est justifiée. Heureux celui dont le Saint béni soit-Il approuve les paroles ! (Sifri) ». (Rashi XXVII, 7)

Rav ‘Hanan Porat 1943-2011) est un éducateur, figure éminente du sionisme religieux. Il développe dans un ouvrage qui reprend ses cours sur la Bible (« Tanakh Chébeal Pé ») une approche passionnée sur l’histoire de ces 5 soeurs. Reprenant un débat du Talmud (Traité Chabbat 96b) entre Rabbi Akiba et Rabbi Yehuda ben Betera sur la personnalité de Tselofhad, il évoque l’idée suivante. Les filles de Tselofhad, pour introduire leur problématique, expliquent que leur père est mort « par sa faute ». Pour Rabbi Yehuida ben Betera, il s’agirait de la faute des Maapilim. 

Ce terme, qui a été repris par le sionisme moderne pour désigner les membres de la Aliya clandestine à l’époque du Mandat anglais, renvoie en fait à un épisode qui passe presqu’inaperçu à la suite de la Faute des Explorateurs. Sous le coup de la punition terrible qui s’abat sur le peuple, un groupe d’hommes et parmi eux Tselofhad décide de se diriger vers la Terre d’Israel et de la prendre coûte que coûte. Défiant la punition, ils pensent montrer ainsi qu’ils ont pris conscience de la gravité de la faute et qu’ils font Techouva. Ce n’était pourtant pas la bonne décision et ils vont être décimés par les ennemis… En fait, c’était trop tôt… 

Noyé au milieu des révoltes et récriminations du peuple d’Israel à cette époque, cet incident est cependant original: cette fois, il s’agissait d’une initiative visant à réparer leur faute et à montrer leur amour pour la Terre d’Israël. Et elle se solde quand même par une tragédie… De quoi ôter l’envie à tous ceux à qui viendrait l’idée d’une nouvelle initiative… 

Alors quand est-il juste de se battre contre le sort? Quand l’initiative est-elle bienvenue?  Ce sont les filles de Tselofhad qui nous montrent la voie…

Elevées par un père qui est mort par amour pour la Terre d’Israël, elles ont ce sentiment chevillé au corps. Mais ce n’est pas chez elles une question de bataille pour une prétendue égalité, ni par jalousie; juste la conscience que la Terre d’Israel mérite que l’on fasse valoir ses droits sur elle. 

Les filles de Tselofhad sont les portes-drapeau des femmes de leur génération. Ces femmes qui n’ont pas fauté, n’ont pas rejeté la Terre avec les explorateurs. Ces femmes qui sont aussi annonciatrices de la valeur féminine des temps messianiques. Elles se démènent pour prendre possession de leur héritage et leur combat est juste et agréé par D.ieu.

Il y a encore un autre héritage dont la Paracha nous parle. Encouragé par l’histoire des filles de Tselofhad, Moché essaie d’obtenir quelque chose pour ses deux fils, Gerchom et Eliezer. Mais la charge de l’enseignement et la fonction de chef spirituel du peuple juif, contrairement à l’héritage patrimonial, ne souffre d’aucun népotisme. D.ieu oppose à Moché une fin de non-recevoir. C’est Yehochoua, qui s’est investi et a fait preuve d’humilité aux côtés de Moché.

Les filles de Tselofhad et les fils de Moché ou la méritocratie de la Torah…

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Sarah Weizman

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