Un petit mot sur la Paracha לעילוי נשמת אבי מורי ראובן בן איסר ע״ה ישראליוויטש

Terouma / A votre bon coeur!

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Après le récit de la Sortie d’Egypte, le Don de la Torah et les Lois de la Paracha Michpatim, la Paracha Terouma est toute entière consacrée à la construction du Michkan, et avec les mille détails techniques de ce projet, elle est une invitation à l’action. On ne compte pas les versets qui sont introduits par des verbes d’action (« Tu feras », « tu recouvriras », « tu fondras », « tu mettras », « tu introduiras », « tu assembleras » etc… ). C’est le temps d’agir. De construire. 

On ne peut que s’étonner de l’idée d’un lieu de culte délimité dans l’espace quand D.ieu remplit la terre entière… A-t-IL besoin d’une maison? N’est-ce pas réducteur? 

Le Sefer Ha’hinoukh, dans un long développement sur la fonction du Temple dit que la finalité réelle de tous les commandements, c’est « pour qu’Il nous fasse du bien », c’est à dire que D.ieu nous donne le moyen de mériter Ses récompenses. Faire un lieu pour Lui, c’est une manière de « préparer notre coeur à Le servir (…) parce que le corps est conditionné par les actions de l’homme; en multipliant les bonnes actions et en s’y conformant, les pensées du coeur s’en trouvent purifiées, affinées, et D.ieu veut le bien de Ses créatures… »

Le Michkan, sa construction et sa maintenance, sont donc censés  affiner l’homme et lui permettre de créer un espace de connexion avec le divin, avant tout en lui-même. 

Ainsi, D.ieu demande à Moché: « Que les Enfants d’Israël me fassent un Mikdach et Je résiderai en eux » (Chemot XXV, 8)

Les commentateurs s’étonnent: il aurait été plus logique de dire « Je résiderai en LUI »? Pourquoi en « EUX »? Parce que ce que D.ieu demande, c’est non pas l’édification d’un lieu de culte mais que chacun lui fasse une place dans son coeur. Hachem ne réside pas à l’intérieur d’une bâtisse mais au sein des bâtisseurs. Ou comme dit le Rabbi de Kotsk: « Dieu s’installe là où on lui fait une place! »

« Parle aux Enfants d’Israël et qu’ils prennent pour Moi un prélèvement , de tout homme que son COEUR motivera vous prendrez Mon prélèvement » (Chemot XXV, 2).

La construction du Michkan n’est pas financée par un impôt prélevé auprès du peuple, mais elle est un acte volontaire, un don, une Terouma.  Car, nous disent les Sages du Talmud, « ce que D.ieu veut, c’est le coeur ». Le projet du Michkan est en quelque sorte l’ancêtre du  financement participatif.  Non pas parce qu’il n’y aurait pas de source de financement alternative, mais précisément en vertu de sa dimension « participative »: il ne s’agit pas d’une obole obligatoire, chacun doit s’investir, réfléchir à ce qu’il veut donner, choisir, y mettre du coeur. Et un projet qui est l’émanation de notre coeur nous appartient. 

De nombreux commentateurs font un parallèle très poussé entre le Michkan, Mikdach, et le foyer familial. Constuire son couple et sa famille, c’est comme construire le Temple, le Sanctuaire:

 – son architecture et les objets qui le composent: la Menora, ce sont les bougies de Chabbat, la Table des Pains renvoie aux Halot de Chabbat, l’Autel des Sacrifices, à la table où nous prenons nos repas, et le Saint des Saints, à la chambre conjugale… 

 – les rôles, la femme étant le Cohen Gadol du foyer, celle qui fait en sorte que la sainteté de l’endroit soit préservée et qui assure le quotidien de son fonctionnement

-mais surtout, la dimension de Sanctuaire.

Qu’est ce qu’un lieu Saint? Que représente la Kedoucha, la sainteté dans le judaïsme? 

Le Rabbin Lord Jonathan Sacks explique que la sainteté, c’est l’espace que vous laissons à D.ieu. D’après la Kabbala du Ari Zal, pour que le monde qu’Hachem a créé puisse exister après les 6 jours de la Création, il a fallu qu’Il fasse un Tsimtsoum (une sorte de réduction de Son énergie). Ainsi, l’homme fait ses propres choix et  son propre monde, parce qu’Hachem fait en sorte de lui laisser de la place. En retour, la Kedoucha serait donc une manière pour l’homme de retenir sa créativité, son ego, son choix pour laisser entièrement la place à D.Ieu. Dans notre vie terrestre, ce ne peut être un état permanent, mais nous pouvons lui réserver des espaces dans le temps, dans le lieu, et dans notre vocation humaine. Le Chabbat est cet espace-temps où nous retenons notre créativité pour expérimenter pleinement un monde de proximité divine. Le Temple est un espace-lieu où l’on crée un vide qui est rempli par la présence divine. (On raconte que lorsque Pompée pénétra dans le Temple, il fut stupéfait de voir que le Saint des Saints était complètement vide; il s’attendait à y trouver une statue du D.ieu des juifs. Il ne pouvait concevoir la sainteté comme une absence, un vide… )  

Il est d’ailleurs particulièrement intéressant que le respect du Chabbat, c’est techniquement s’abstenir de pratiquer les 39 travaux définis comme nécessaires à la construction du Michkan et leurs dérivés. La jonction entre l’espace-temps (Chabbat) et la construction de l’espace-lieu (Michkan) consacrés à D.ieu, c’est la quintessence de la Kedoucha. 

Et chaque foyer, chaque famille, c’est aussi un Michkan, un lieu qu’il nous faut sanctuariser. Préserver des influences destructrices. Magnifier. Et en faire le siège de la présence divine. 

Que nous dit la Paracha Terouma sur la façon d’y parvenir?

D’abord, la puissance du don volontaire. La construction d’un foyer, c’est la volonté délibérée de deux individus libres de s’obliger l’un envers l’autre et surtout, envers le projet du couple. La clé de la réussite, c’est le coeur. Lorsque l’on s’investit et que l’on donne avec générosité, que ce soit à D.ieu ou à son prochain, on fait résider la présence divine parmi nous. 

Ensuite, la force de l’action. Créer les conditions de l’harmonie et la sainteté nécessite une action infatigable. Des détails, une construction physique, une recherche de la perfection, une précision. Des efforts. C’est un lieu pour D.ieu après tout…

Puis, investir son rôle. Il y a ceux qui apportent la matière première, les architectes, le chef de chantier. Il y a les musiciens et les Prêtres. Et le Cohen Gadol. Chacun doit tenir son rôle. Le maîtriser. 

Enfin, sanctuariser ce lieu. Notre couple, notre foyer, notre famille, mérite qu’on les défende des attaques et influences négatives. Il impose une vigilance.

Et par-dessus tout, faire le vide. Mais la nature a horreur du vide. Et si nous travaillons avec le coeur, et dans l’intention de la construction et du bien, cette annulation de notre ego, ce vacuum permettra de laisser Hachem s’installer. 

C’est ainsi que Sa présence devient palpable et que nous expérimentons la Kedoucha dans notre vie. 

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Sarah Weizman

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